Vietnam: la contestation vient du web

Avec l’essor de l’accessibilité au wifi dans les universités et cybercafés au Vietnam, les bloggeurs ont pu développer leur guerre contre la censure du Parti Communiste. Sous son pseudonyme, Mr Cold explique:

« On n’ira pas dans la rue, on ne criera rien. Nous sommes assis devant un écran, tapant et bloggant. C’est comme ça que nous nous rebellons. Les médias officiels décident de ce qu’on va entendre, lire et voir. Ils sont les esclaves des Communistes. »

Les médias officiels couvrent des informations lisses et généralistes, souvent orientées business, ou des projets de développements mis en avant par l’État. Ces bloggeurs, eux, critiquent le gouvernement et diffusent des informations absentes des journaux pour cause de censure. Le secteur des médias reste le seul secteur à ne pas avoir vraiment connu le relâchement du Communisme vietnamien. Journaux, télévisions et radios restent sous le contrôle très strict du gouvernement. Et les journalistes professionnels, s’ils s’amusent à diffuser des informations sensibles (comme le fameux scandale de 2006, où l’on avait découvert une affaire de corruption au sein du ministère des transports, qui plaçait l’argent public dans des paris de match de football…), les sanctions tombent, allant de la suppression de la carte de presse à des années de prison.
L’opposition politique se concentre donc sur le web, où les bloggeurs ont encore la liberté de parler de politique, mais aussi de sexualité et de drogue.
Néanmoins, comme je le reportais ici, le gouvernement commence à réagir à cette profusion de blogs personnels. En 2000, il y avait 200000 utilisateurs d’Internet au Vietnam, contre 17,5 millions aujourd’hui, et environ 1 million de blogs pour une population totale de 86 millions d’habitants. Suffisamment pour que le gouvernement prenne très au sérieux le risque de protestation virale.
Bien sûr, il n’y a pas que des blogs de contestation politique, et certains bloggeurs choisissent d’appeler aux reformes d’une manière plus subtile, en éduquant les jeunes défavorisés aux nouvelles technologies, ou en défendant la liberté de parole sans critiquer le gouvernement en place. Mais ils restent minoritaires face aux bloggeurs de combat, critiquant le Vietnam et, parfois plus vigoureusement, la Chine.
Ils arrivent parfois à s’organiser, comme on l’avait vu l’an dernier pour une grande manifestation à Hanoi pour protester contre l’attitude du gouvernement chinois dans le délicat problème de la revendication des îles Spratly et Paracel (campagne online qui avait d’ailleurs été relayée sur mon blog 😉 ).
Occasionnellement, ils arrivent même à hacker des sites officiels pour y insérer des messages pro-démocratiques.

Il va falloir suivre de très près la riposte d’Hanoi (cf. mon dernier post sur le sujet), qui risque très prochainement de limiter et de contrôler l’accès à l’une des plateformes de blogs les plus prisées, Yahoo 360°…

Crédit citation et chiffres: Geoffrey Cain, San Francisco Chronicle

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